A la UneMédecine et TechnologiePrévention et Bien-être

Le numérique redéfinit l’accès à la santé mentale

Dr Fanny Jacq
Psychiatre et membre fondateur du Collectif MentalTech

Une dégradation continue de la santé mentale des Français

La santé mentale des Français, et en particulier celle des jeunes adultes, connaît une dégradation continue depuis plusieurs années. Les indicateurs de souffrance psychique progressent, la prévalence des troubles anxieux et dépressifs augmente, et les dispositifs de soins traditionnels peinent à absorber une demande qui s’intensifie. Aujourd’hui, 4 Français sur 10 déclarent avoir déjà consulté un professionnel de santé mentale, avec une prépondérance marquée chez les femmes, soit +9 points par rapport aux hommes, et chez les moins de 35 ans, à 58 % contre 37 % chez les plus de 35 ans.

Le numérique comme nouvelle porte d’entrée vers la santé mentale

Le numérique apparaît comme une nouvelle porte d’entrée vers la santé mentale. Son usage progresse, et la dynamique d’adoption témoigne d’une évolution profonde des mentalités et d’un intérêt croissant pour ces solutions perçues comme flexibles et accessibles. Aujourd’hui, 1 Français sur 2 utilise un outil numérique dédié à la santé mentale, et 14 % des non-utilisateurs ou utilisateurs passés déclarent envisager de le faire si le besoin se présentait. À noter que l’usage reste majoritairement ponctuel, avec 35 % des utilisateurs concernés contre 29 % déclarant un usage régulier.

Des usages centrés sur l’accès aux soins

Les outils numériques les plus utilisés sont ceux qui répondent directement aux enjeux d’accès au soin. Les plateformes de prise de rendez-vous et les services de téléconsultation arrivent en tête, traduisant la fonction prioritaire assignée au numérique, à savoir fluidifier l’entrée dans le système de soins et réduire les délais d’accès. Ce recours s’inscrit dans un contexte marqué par une disponibilité insuffisante des professionnels et une répartition géographique inégalitaire de l’offre de soins.

L’essor du quantified mind chez les jeunes adultes

D’autres usages numériques se développent également, notamment autour des objets connectés. Leur succès s’inscrit dans la dynamique du « quantified self », qui valorise la mesure et l’analyse de données personnelles comme moyen de mieux comprendre son propre fonctionnement. La santé mentale n’échappe plus à cette tendance. Les jeunes adultes, en particulier, cherchent à quantifier leur sommeil, leur activité, leur humeur, leurs ressentis émotionnels et même leurs performances cognitives, donnant naissance au concept émergent de « quantified mind ». Ces outils répondent à une génération en quête d’indicateurs concrets pour objectiver des états psychiques souvent difficiles à verbaliser.

Des écarts marqués selon le genre et l’âge

L’adoption n’est toutefois pas homogène. Les femmes apparaissent légèrement plus utilisatrices que les hommes, avec 50 % contre 44 %. L’écart est nettement plus marqué entre les générations, avec un taux d’usage futur de 69 % chez les moins de 35 ans contre 40 % chez les plus de 35 ans. Les plateformes de prise de rendez-vous sont utilisées de manière relativement comparable selon l’âge. En revanche, les écarts deviennent significatifs pour les usages les plus innovants. L’IA conversationnelle attire 36 % des moins de 35 ans contre seulement 13 % des plus de 35 ans. La téléconsultation concerne 27 % des moins de 35 ans contre 9 % des plus de 35 ans. Les applications dédiées aux addictions sont utilisées par 20 % des moins de 35 ans contre 5 % des plus de 35 ans.

Un fort potentiel d’adoption future

Parmi les outils numériques suscitant le plus fort potentiel d’adoption future, la téléconsultation se positionne en tête. 15 % des Français déclarent qu’ils seraient prêts à y recourir. Les applications de bien-être et les objets connectés suivent, avec chacun 14 % d’intentions d’usage.

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page